Je regarde le paysage magnifique qui s’étend sous mes yeux. Montagnes, plateaux, sommets enneigés. Toute la magnificence du pays Gapençais. Qu’est ce qu’il est beau cet endroit. Plus je passe du temps ici, plus je m’émerveille. J’ai le coeur en joie. En joie d’avoir trouvé un lieu qui me fait vibrer, un lieu où j’ai envie de vivre. Je suis de retour dans les Hautes-Alpes. Après le mois de Décembre chez Jules à rénover une vieille ruine, je suis rentrée passer les fêtes chez mes parents. Et j’ai postulé pour une formation en éco-construction de neuf mois au sein du centre Le Gabion à Mane dans les Alpes de Hautes-Provence. J’ai passé l’entretien oral mi-janvier et j’ai reçu la réponse positive une semaine après ! Quelle joie ! J’ai la sensation d’être plus légère. Le poids qui pesait sur mon coeur s’est envolé. J’ai choisi cette voie et la vie a confirmé mon choix. Il y a un an, presque jour pour jour, je commençais à travailler au sein de l’hôtel Mercure à Chamonix. Un an plus tard, ma vie a entièrement changé. Pour quelque chose de mieux. C’est le début d’une année merveilleuse. D’une année pleine de changement et de positif. Je vais tout faire pour que cela se réalise.
En attendant le début de la formation, le 19 février, je suis de nouveau partie en vadrouille. Le karma m’a mené ici, à Théus, de l’autre coté de la vallée de Gap, direction Embrun et le lac de Serre-Ponçon. À 1400 mètres sur les flancs du Mont Colombis, se trouve une petite ferme dans un écrin de paradis. Les Sens de Théus, tenu par Pauline et Jean-Pascal est un lieu magique. Une toute petite route qui serpente, une vieille bâtisse en pierre, la nature tout autour, l’odeur des plantes, le chant des oiseaux et une vue à couper le souffle. Tout ici appelle à l’émerveillement. Les formes, l’architecture paysanne, les textures, je me sens passionnée. L’énergie de l’endroit se déverse à travers moi et je l’accueille avec délice.
La ferme et la vue sur la vallée Gap avec la montagne de Céüse enneigée.
Différentes textures et dessins dans le bardage en bois de la ferme.
Pauline et Jean-Pascal sont paysans producteurs cueilleurs herboristes. Le couple d’une quarantaine d’année s’est installé à Théus il y a trois ans. Tous deux sont d’anciens athlètes de haut niveau en ski de fond. Ils se sont reconvertis il y a une dizaine d’années, d’abord dans le maraîchage avant de bifurquer vers les plantes médicinales. Je suis impressionnée. Ils ont accomplis en à peine trois ans, ce qu’il faut à la plupart des gens cinq ans pour le faire.
Mon séjour chez eux est comme un cadeau tombé du ciel. En plein hiver, ce n’est pas la saison des récoltes et de la cueillette mais nos discussions sont extrêmement intéressantes. Ils sont une mine d’or sur les plantes et leurs utilisations. J’apprends énormément. Ils sont aussi d’une gentillesse incroyable et véritablement passionnés par leur métier. Malgré que celui-ci soit interdit en France, ils se revendiquent sans peur herboristes. Tout dans leur démarche renvoit à un choix politique, un choix de société, une vision d’un avenir plus en lien avec la terre, l’autonomie et la simplicité. Cela me fait énormément plaisir de côtoyer des gens comme eux. Radicaux dans leur choix et essayant réellement de s’inscrire dans une démarche écologique.
Pauline et Jean-Pascal cueillent environ une centaine de plantes locales pour concevoir leurs produits. La majorité se fait en cueillette sauvage. Le reste est planté quelques mètres plus haut. Ils suivent le cahier des charges Bio et surtout celui des Simples, bien plus restrictif. L’éthique écologique et la production artisanale sont au coeur de leur métier. Ne travailler qu’avec des plantes locales et proposer une diversité de produits de qualité orientent leurs projets. La préservation de l’environnement et des ressources floristiques sont des considérations vitales pour eux et ils font attention à ne pas faire de récoltes trop intensives. Tout est cueilli à la main et chaque produit est réalisé en utilisant du matériel traditionnel de qualité. L’utilisation de plastique est également réduite à son strict minimum.
Huiles essentielles, eaux florales, huiles florales, alcoolatures, gemmothérapies, tisanes… Je découvre l’ensemble de leur production dans de jolis flacons en verre entourés de très jolies étiquettes. Leur identité visuelle est très belle. Et bien plus élaborée que toutes celles des paysans producteurs que j’ai vu jusqu’à présent. La qualité du travail me saute au yeux. Pauline et Jean-Pascal ne font pas les choses à moitié. Par contre leur site a besoin d’une refonte et les photographies ne mettent pas en valeur leurs produits. Ma fibre de designer photographe me démange et poussée par la justesse de leur démarche et l’intérêt grandissant que je porte à leur projet, je leur propose mon aide.
Quelques unes de leurs huiles essentielles photographiées par moi. La ferme regorge de matières et de textures incroyables et j’ai décidé d’utiliser cela pour les mises en scène. Pour les huiles essentielles, je suis partie sur un jeu de formes et de textures avec des morceaux de bois.
Les jours filent entre l’application d’un enduit terre sur les murs de la grange, la préparation de gemmothérapies et d’alcoolatures issues des récoltes de l’année dernière, le travail sur la refonte du site et la prise de photographies. Le mélange des différentes activités me réjouis. L’éco-construction, les plantes, la photographie et le design. D’un seul coup quelque chose me saute aux yeux. Mais pourquoi choisir entre ces différentes activités ? Pourquoi ne pas essayer de travailler dans ces trois domaines ? Combiner éco-construction, santé au naturel et web-design. Pourquoi ne pas garder les compétences acquises durant mes études d’art, cinéma et design et les utiliser en combinaison avec mes nouveaux centres d’intérêts ? Moi qui ai besoin de variétés, de changements pour garder de l’intérêt, ne devrais-je pas imaginer un futur lié à ces trois thématiques ? La vision conventionnelle, cloitrée, du travail unique, pendant des années dans la même entreprise, est dépassée. Rien ne me retient de choisir autre chose. Il m’apparait même salutaire, face aux difficultés de société à venir, de multiplier mes domaines d’activités professionnelles afin d’augmenter ma résilience.
En discutant avec Pauline et Jean-Pascal, ceux-ci m’encouragent dans mon choix. Pourquoi ne pas envisager des activités professionnelles liées aux saisons : au printemps et en automne, les chantier d’éco-construction. En été, le travail lié aux plantes. Et en hiver, quand il fait froid et que le rythme est ralenti, des projets de web-design en lien avec l’écologie et l’artisanat. L’idée me plaît énormément. Reste à voir comment la mettre en place. Comment faire pour associer de façon efficace les trois activités. Il va me falloir saisir les opportunités et me construire un réseau. Garder les yeux et le coeur grands ouverts et attirer les bonnes énergies.
Pauline et Jean-Pascal me parlent de leurs idées, de l’aménagement de la ferme, de nouveaux produits, de ce qu’ils imaginent pour l’avenir. En filigrane, je vois le mien se clarifier. En perpétuel évolution, en redéfinition permanente mais toujours vers quelque chose de meilleur. Je quitte la ferme le coeur léger. Je vais y revenir durant toute l’année pour continuer de travailler sur la refonte du site et les photographies. L’univers m’envoie des signes, des cadeaux, que je me dois de ne pas rater. Rencontrer Les Sens de Théus en fut un et j’en suis extrêmement reconnaissante.
Pauline en Mars, en train de récolter des bourgeons d’Amandiers afin de réaliser une gemmothérapie. Travailler à l’air libre, au contact de la nature et au rythme des saisons, c’est exactement ce qui lui plaît dans le métier de paysan-herboriste.
Vue sur le lac de Serre-Ponçon depuis le sommet du mont Colombis.
Note :
Pour plus d’informations sur Les Sens de Théus, n’hésitez pas à vous rendre sur leur site internet (entièrement retouché par moi-même).