Apprentissages en pays tranquille. Treize mois, de Mai 2016 à Juin 2017 en Australie et Nouvelle-Zélande.

La surprise du Mt Judah Track

Randonner dans les montagnes de Glenorchy et découvrir le très beau Mont Judah Track.
23 février 2017
Mont Judah Track dans l'Otago, Île du Sud, Nouvelle-Zélande © Claire Blumenfeld
CARNET

D’un jour à l’autre, j’ai sauté de l’hiver à l’été. Rien à voir avec les jours précédents. La pluie et les nuages ont déserté le coin. Il fait chaud et les cigales chantent dans les herbes. Un temps parfait pour une randonnée. Je laisse ma tente et mon vélo au minuscule camping de Glenorchy et mets le cap sur le Whakaari Conservation Park à deux kilomètres de Glenorchy où se trouvent le Mont Judah Track et le Mont McIntosh Loop Track. Je pense faire le second. Nuit dans un refuge en haut d’un col à 1464 mètres et descente le lendemain en suivant les crêtes.

La zone de conservation Whakaari, dont le nom maori signifie « terrain élevé » couvre 9400 hectares de montagnes âpres couvertes de tussock (grandes herbes jaunes) où quelques moutons vivent en liberté. cela me change du Fiordland et de sa rainforest. D’un point de vue géologique le coin fut de grande importance durant le 19ème siècle. En effet, le sol est fait de schist à l’intérieur duquel se trouve de l’or et du scheelite. Le scheelite est un matériau très résilient, dont la demande fut grande en temps de guerre. De nombreux filons furent découvert ici et la première installation de traitement du scheelite dans les montagnes fut mise en place au début de l’année 1880. Durant les Première et Seconde Guerres Mondiales, les deux mines de la région, Paradise et Mont Judah, employèrent un grand nombre de mineurs afin de maintenir la production.

J’attaque la montée sous un soleil de plomb. Le sentier suit l’ancien chemin des mineurs et de nombreuses explications sont disponibles le long du trajet. Après quelques mètres d’ascension, la vue sur la vallée se dévoile, absolument grandiose. Je passe l’ancien traitement de scheelite puis une des mines et m’enfonce dans les montagnes. Le Mont McIntosh se dévoile devant moi et je peux voir sur la montagne les nombreux zigzags témoignant de l’intense activité qui occupait autrefois la région. Le mont est nommé d’après William McIntosh, un berger qui fut le premier à trouver du scheelite en 1910 dans les flancs de la montagne.

J’abandonne le Mont Judah Track qui continue à suivre la piste des mineurs pour m’engager sur le Mont McIntosh Loop Track. Le sentier descend raide jusqu’à la rivière Buckler Burn que je suis sensée traverser pour remonter de l’autre coté sur les flancs du Mont McInstosh. Hélas, impossible de traverser ! Suite à la grosse pluie des jours précédents, la rivière est très haute et il y a beaucoup de courant. Je teste quand même sans mon sac mais arrivée au milieu, je fais demi-tour. Il y a plus d’un mètre d’eau de profondeur et cela devient trop dangereux. C’est avec un immense regret que j’abandonne le reste du sentier pour remonter de là où je suis venue. Pas de second jour sur les crêtes, pas de vue spectaculaire de la région ! Ma déception est immense.

Je décide néanmoins, maintenant que je suis là, de continuer sur le Mont Judah Track. Un refuge se trouve en haut du sentier. La vue sera probablement moins belle mais ça vaut le coup d’essayer. Je passe l’après-midi à monter péniblement sous le soleil, tout en passant plusieurs huttes de mineurs. Alors que j’attaque la dernière partie de la montée, à une altitude beaucoup plus haute que ce que je pensais, la vallée se dévoile devant mes yeux. La rivière Dart avec ses nombreux petits ruisseaux apparait devant mes yeux et mon moral remonte en flèche. Quelle vue ! 

J’arrive enfin au refuge Heather Jock Hut, lui aussi ancienne hutte de mineurs, perché tout en haut de la montagne à 1300m et j’en pleure presque de joie. Le coin est splendide, la hutte est super et la vue à tomber par terre. Toute ma déception a disparue. Le refuge est minuscule. À peine l’espace pour trois lits et une table. Un vieil âtre recouvert de suie invite à faire du feu mais il n’y a pas e bois. Je passe un bon bout de temps à explorer les environs tout en m’émerveillant de la beauté du paysage. Soirée tranquille dans ma hutte, perchée sur les sommets, seulement perturbée par une petite souris ! Elle farfouille de tous les cotés et l’odeur de ma nourriture l’intéresse grandement. Mon sommeil sera plutôt léger, me réveillant plusieurs fois pour chasser l’animal en train d’essayer de pénétrer dans mon sac.

Le lendemain, j’assiste au lever du soleil sur les les montagnes en face. Un Kea solitaire fait son apparition et nous passons un moment à échanger des regards. Il grignote le caoutchouc présent sur le toit du refuge tout en suivant mes moindres faits et gestes. À chaque fois que je m’éloigne un peu, il me suit ! Laissant mon petit coin de paradis derrière moi, je redescends dans la vallée par le même chemin, puisque c’est le seul existant de ce coté de la montagne. Un peu plus bas, rattrapée par le soleil, je croise un petit groupe de moutons couverts d’une impressionnante couche de laine. Le temps est splendide, il n’y a pas un seul nuage dans le ciel. De retour au début du chemin, je repars vers Glenorchy, un sentiment d’intense satisfaction dans le coeur. 

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